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Les apports du BOSS sur les frais professionnels liés au télétravail

Le Bulletin Officiel de sécurité sociale (BOSS) est en ligne depuis le 8 mars 2021, date à laquelle un premier lot de fiches a été déployé sur Internet. Son contenu sera opposable à compter du 1er avril. Nous revenons aujourd’hui plus précisément sur le volet frais de télétravail, et en particulier sur les allocations forfaitaires qui peuvent être versées par l’employeur.

Principe : remboursement des frais de télétravail sur justificatifs

De longue date, la réglementation relative aux frais professionnels envisage expressément la situation du télétravail en posant un principe d’exonération sur justificatifs (remboursement « au réel ») (arrêté du 20 décembre 2002 modifié, art. 6).

Sur ce principe d’exonération sur justificatifs, on notera que le BOSS a repris les précisions diffusées en son temps par la DSS au travers de ses circulaires (circ. DSS/SDFSS/5B 2003-7 du 7 janvier 2003 ; circ. DSS/SDFSS/5B 2005-376 du 4 août 2005, § III, 3-3-4).

En son temps, l’administration avait notamment dressé un tableau (voir ci-après) des modalités d’évaluation des frais considérés comme des frais professionnels, aujourd’hui repris dans le BOSS (BOSS, Frais professionnels, § 1790-1/04/2021).

Précisons que ce tableau donne l’interprétation de l’administration, lesdites listes de frais et règles d’évaluation ne figurant pas dans l’arrêté.

Celui-ci se contente en effet d’identifier trois grandes catégories de frais de ce type peuvent être identifiées : les frais fixes et variables liés à la mise à disposition d’un local privé pour un usage professionnel, les frais liés à l’adaptation d’un local spécifique ainsi que les frais de matériel informatique, de connexion et de fournitures diverses.

Intégration des tolérances sur les allocations forfaitaires de frais de télétravail

Alternativement au principe du remboursement au réel, le réseau des URSSAF a admis en décembre 2019 une possibilité de prise en charge sous forme d’allocation forfaitaire, que l’on retrouve désormais dans le BOSS.

Il y a ainsi une officialisation des tolérances en matière d’allocations forfaitaires de frais de télétravail : l’employeur peut rembourser les frais sous la forme d’allocations forfaitaires, en franchise de cotisations, dans la limite globale de 10 € par mois pour une journée de télétravail par semaine, sans justificatif. La limite d’exonération varie en fonction du nombre de jours télétravaillés : 20 € par mois pour 2 jours de télétravail par semaine, 30 € par mois pour 3 jours de télétravail par semaine, etc., jusqu’à un maximum de 50 € par mois (BOSS, Frais professionnels, § 1810, 01/04/2021).

Une nouveauté cependant : en cas d’allocation fixée par jour, la limite d’exonération est fixée à un montant journalier d’au plus 2,50 €, dans la limite de 55 € par mois.

Notons que lorsque le montant de l’allocation forfaitaire versé par l’employeur dépasse ces limites, l’exonération de charges sociales peut encore être admise, mais à condition de justifier de la réalité des dépenses professionnelles supportées par le salarié.

Attention : à l’heure où nous rédigeons ces lignes, le BOSS ne reprend pas la tolérance URSSAF diffusée début février 2021 selon laquelle lorsqu’une allocation forfaitaire est prévue par une convention collective de branche, un accord professionnel ou interprofessionnel ou un accord de groupe, l’exonération s’applique dans la limite des montants prévus par accord collectif, dès lors que l’allocation est attribuée en fonction du nombre de jours effectivement télétravaillés.

Frais liés à l’utilisation par le salarié de ses propres outils issus des NTIC

La question du télétravail revient également dans les développements du BOSS relatifs aux frais professionnels liés à l’utilisation par le salarié de ses propres outils issus des technologies de l’information (TIC) pour travailler (ordinateur personnel, connexion personnelle, etc.).

En cas de circonstances exceptionnelles ou de force majeure justifiant la mise en place du télétravail, l’administration précise qu’il y a lieu de considérer que les frais engagés à des fins professionnelles par le salarié ou assimilé pour l’utilisation d’outils issus des technologies de l’information et de la communication (TIC) qu’il possède (ex. : ordinateur), en l’absence d’outils fournis par l’employeur, sont des charges de caractère spécial inhérentes à la fonction ou à l’emploi (BOSS, Frais professionnels, § 1860).

À noter : le BOSS ne l’indique pas, mais on peut raisonnablement penser que l’épidémie devrait constituer une circonstance exceptionnelle. Une précision expresse de l’administration aurait le mérite de lever tout doute sur la question.

Dans ce cas, l’exonération de cotisations et contributions sociales au titre des frais professionnels peut porter sur le matériel informatique ainsi que sur les consommables et les frais de connexion (BOSS, Frais professionnels, § 1870) :

-soit sur la base de la réalité des dépenses (pour le matériel amortissable, l’exclusion d’assiette prend en compte les annuités d’amortissement ; pour le petit matériel non amortissable, référence à la valeur réelle de l’année d’acquisition ; pour les consommables et frais de connexion, remboursements sur justificatifs de frais) ;

-soit sur la base d’une allocation forfaitaire ne pouvant excéder 10 € par semaine lorsque l’employeur ne peut pas justifier la réalité des dépenses professionnelles supportées par le salarié.

Pour les abonnements triple ou « quadruple play » (téléphone fixe, mobile, Internet, télévision) pour lesquels la part afférente au financement de l’abonnement TV n’est pas déterminable, l’administration considère qu’il convient d’appliquer la même règle. Lorsque l’employeur ne peut pas justifier de la réalité des dépenses professionnelles supportées par le salarié, la part des frais professionnels est déterminée d’après la déclaration faite par le salarié évaluant le nombre d’heures à usage strictement professionnel, dans la limite de 50 % de l’usage total (BOSS, Frais professionnels, § 1880). On notera que sur ce dernier point, le BOSS reprend le rescrit social du 25 février 2010 publié en son temps au BO Santé, qui précisait exactement le même principe.

La question qui reste toutefois en suspens est celle de la combinaison de ces deux mesures « NTIC » avec les dispositions relatives à la prise en charge des frais de télétravail proprement dits (voir plus haut). En effet, si une prise en charge des frais de télétravail est mise en place (ex. : allocation forfaitaire), les allocations pourraient avoir pour partie le même objet.

L’administration profitera peut être du délai qui sépare la date de mise en ligne du BOSS (8 mars) de sa date d’opposabilité (1er avril 2021) pour clarifier ce point, loin d’être négligeable dans le contexte de télétravail massif lié à la crise sanitaire.

Attention - NDLR 02/04/2021 : la Direction de la sécurité sociale a effectivement profité de ce délai pour modifier très sensiblement ce passage du BOSS au 1er avril 2021. Les précisions relatives à des remboursements de frais de NTIC ci-dessus exposées ont évolué comme suit :

-côté frais liés à l’utilisation par le salarié de ses propres outils NTIC, l’allocation forfaitaire n’est plus de 10 € par semaine ; le BOSS indique désormais que si l’employeur ne peut pas justifier la réalité des dépenses professionnelles supportées par le salarié, mais que les frais engagés sont justifiés par une raison professionnelle, ils peuvent être remboursés sur la base d’une allocation forfaitaire ne pouvant excéder 50 € par mois, ; par ailleurs, il n’y a plus de précision spécifique sur les abonnements triple ou « quadruple play » le remboursement doit s’effectuer soit sur justificatifs, soit dans le cadre de l’allocation forfaitaire ;

-en cas de télétravail lié à des circonstances exceptionnelles ou de force majeure, les frais engagés par le salarié qui utilise ses propres outils NTIC pour travailler, en l’absence d’outils fournis par l’employeur, sont considérés comme des frais professionnels : dans cette situation, le BOSS précise désormais que ces frais peuvent être pris en charge selon les dispositions prévues pour les frais de télétravail (voir plus haut, sur justificatifs ou par allocations forfaitaires) ; il est précisé que ce remboursement lié aux frais de télétravail n’est pas cumulable avec un remboursement effectué au titre des frais d’utilisation des outils NTIC personnels du salarié (puisque ces frais seront déjà couverts).

Titres-restaurant

Dans les entreprises dont les salariés bénéficient de titres-restaurant, il peut en être de même pour les télétravailleurs (à domicile, nomades ou en bureau satellite). Ces titres restaurants ouvrent droit, selon l’administration, aux mêmes exonérations, sous les mêmes conditions, que pour les salariés sur site (BOSS, Frais professionnels, § 1800, 01/04/2021).

Frais professionnels liés au télétravail : modalités d’évaluation (a)
Nature des frais
Évaluation des frais
Frais fixes
• Montant du loyer ou, à défaut de loyer, valeur locative brute au prorata de la superficie affectée à l’usage professionnel
• Taxe d’habitation
• Taxe foncière sur les propriétés bâties
• Taxes régionales, départementales ou communales comme la taxe d’enlèvement des ordures ménagères
• Charges de copropriété
• Assurance multirisque- habitation
• Valeur réelle : quote-part des frais fixes réellement supportés au titre du local affecté à un usage professionnel (au prorata de la superficie totale de l’habitation principale).
• Exemple : appartement de 70 m2 dont 10 m2 affectés à l’usage professionnel, loyer mensuel de 350 € avec une prime d’assurance mensuelle de 15 €. Les frais professionnels correspondants sont de : 365 × 10/70 = 52 €.
Frais variables
• Chauffage et/ou climatisation
• Électricité
• Valeur réelle : quote-part des frais variables réellement supportés au titre du local affecté à un usage professionnel.
Dépenses d’acquisition du mobilier
• Bureau ergonomique
• Fauteuil ergonomique
• Étagères, meubles de rangement
• Lampe de bureau
• En cas de prêt de mobilier :

-absence de dépenses supplémentaires du salarié : pas de remboursement de frais possible ;

-avantages en nature à évaluer sur une base réelle (valeur résiduelle = valeur nette comptable) s’il y a abandon définitif du mobilier au travailleur salarié ou assimilé.

• En cas d’achat du mobilier par le salarié pour le compte de l’entreprise, le salarié en restant toutefois propriétaire :

-remboursements des frais exclus de l’assiette dans la limite de 50 % de la dépense réelle sur justificatifs.

• Modalités de déduction :

-annuités d’amortissement du mobilier (pratiques comptable et fiscale) ;

-pour le petit mobilier non amortissable : valeur réelle de l’année d’acquisition.

Frais liés à l’adaptation du local
• Frais de diagnostic de conformité électrique
• Installations de prises (téléphoniques, électriques, etc.)
• Modifications liées à la mise en conformité avec la législation du travail
• Valeur réelle : l’exclusion de l’assiette des cotisations de ces frais est admise sur présentation de la facture (travaux d’aménagement).
Matériels informatiques périphériques
• Ordinateur, imprimante, modem…
• En cas de prêt de matériel :

-absence de dépenses supplémentaires du travailleur salarié ou assimilé, pas de remboursement de frais possible ;

-avantages en nature à évaluer sur une base réelle (valeur résiduelle = valeur nette comptable) s’il y a abandon définitif du mobilier au travailleur salarié ou assimilé.

• En cas d’achat de matériel par le salarié pour le compte de l’entreprise, le salarié en restant toutefois propriétaire :

-remboursement des frais et exclusion de l’assiette dans la limite de 50 % de la dépense réelle sur justificatifs.

• Modalités de déduction :

-annuités d’amortissement du matériel (pratiques comptable et fiscale) ;

-pour le petit matériel non amortissable : valeur réelle de l’année d’acquisition.

Consommables, internet, téléphone
Ramettes de papier, cartouches d’encre, etc.
Remboursement sur justificatifs des frais et déduction de l’assiette.
Frais de connexion au réseau téléphonique, frais d’abonnement (téléphonique, Internet…)
Remboursement sur présentation des justificatifs de frais.
(a) BOSS, Frais professionnels, § 1790-01/04/2021. Plutôt que prendre en charge les frais sur la base des dépenses réelles, l’employeur peut aussi procéder sous formes d’allocations forfaitaires.

Bulletin officiel de sécurité sociale, Frais professionnels https://boss.gouv.fr (au 16/03/2021)