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Mesures exceptionnelles covid-19

Congés, RTT, CDD et prêt de main-d’œuvre : 6 mois de plus pour les exceptions Covid-19

Une ordonnance du 16 décembre 2020 proroge jusqu’au 30 juin 2021 un certain nombre d’assouplissements dans les domaines des congés, des jours de repos, du CDD, de l’intérim et du prêt de main-d’œuvre, qui devaient initialement cesser de s’appliquer le 31 décembre 2020. Attention, ces mesures ne sont pas toutes reconduites à l’identique.

Prolongation des aménagements en matière de congés et de jours de repos

Une ordonnance du 25 mars 2020 a mis en place un certain nombre de dérogations en matière de repos et de congés (ord. 2020-323 du 25 mars 2020, art. 1 à 4 modifiés).

Imposer des congés payés dans le cadre d’un accord collectif. - Si un accord d’entreprise ou, à défaut, un accord de branche l’autorise, l’employeur peut :

-imposer aux salariés la prise de congés payés acquis ou modifier les dates de congés payés déjà posés, dans la limite de 6 jours ouvrables et sous réserve de respecter un délai de prévenance d’au moins 1 jour franc ;

-fractionner le congé principal sans avoir à obtenir l’accord du salarié ;

-ne pas accorder un congé simultané à des conjoints ou des partenaires « pacsés » travaillant tous les deux dans l’entreprise.

Rappelons que dans ce cadre, l’employeur peut le cas échéant imposer la prise de jours de congés payés acquis avant l’ouverture de la période au cours de laquelle ils auraient normalement vocation à être « posés ». Avec la prolongation du dispositif (voir plus loin), il est par exemple possible de décider qu’un salarié sera en congés payés une semaine en février 2021, y compris s’il s’agit de six jours ouvrables de CP accumulés sur le début de la période d’acquisition en cours (1er juin 2020 - 31 mai 2021), et qui, en principe, sont plutôt destinés à être posés sur la période de prise de l’été 2021.

Imposer la prise de jours de repos (RTT, etc.) sans accord collectif. - En l’absence d’accord collectif, mais à condition que l’intérêt de l’entreprise le justifie eu égard aux difficultés liées à la propagation du covid-19 et sous réserve d’en informer le comité social et économique (CSE), éventuellement a posteriori (mais « sans délai »), l’employeur peut :

-imposer la prise de jours de repos ou modifier les dates de jours de repos déjà posés (JRTT et jours de repos des salariés en forfait-jours), y compris s’il s’agit de jours en principe « au choix du salarié », sous réserve de respecter un délai de prévenance d’au moins 1 jour franc ;

-imposer que les droits affectés à un compte épargne-temps (CET) soient utilisés sous forme de jours de repos et en fixer les dates, également sous réserve de respecter un délai de prévenance d’au moins 1 jour franc.

Le nombre global de jours pouvant être imposés ou modifiés dans le cadre de ces dispositions est limité à 10 par salarié, tout compris (RTT, repos des forfaits jours et CET).

Prolongation jusqu’au 30 juin 2021. - Pour toutes ces mesures, la période de prise des jours de repos ou de congés imposés ne pouvait pas s’étendre au-delà du 31 décembre 2020. L’ordonnance du 16 décembre 2020 permet désormais d’aller jusqu’au 30 juin 2021. Cette mesure a été rendue possible par la loi du 14 novembre 2020 autorisant la prorogation de l’état d’urgence sanitaire (loi 2020-1379 du 14 novembre 2020).

À noter que l’ordonnance du 25 mars 2020 comportait également, pour certains secteurs d’activité, des dérogations en matière de durée maximale du travail et de travail dominical. En l’état actuel des textes, ces mesures doivent prendre fin le 31 décembre 2020. L’ordonnance du 16 décembre 2020 n’a en effet pas prévu de reporter cette échéance.

Prolongation des aménagements par accord d’entreprise des modalités de recours au CDD et à l’intérim

La deuxième loi d’urgence, en date du 17 juin 2020, a offert aux entreprises la possibilité d’aménager par accord collectif certaines des modalités légales de recours au CDD, alors qu’en temps normal seul un accord de branche étendu peut prévoir de telles dérogations (loi 2020-734 du 17 juin 2020, art. 41). Les points ainsi ouverts à la négociation d’entreprise sont les suivants :

-nombre maximal de renouvellements ;

-modalités de calcul du délai de carence entre deux CDD ;

-hypothèses dans lesquelles le délai de carence n’est pas applicable.

Le travail temporaire fait l’objet de mesures semblables, avec en plus la possibilité exceptionnelle de prévoir par accord d’entreprise des cas de recours différents de ceux fixés par la loi (c. trav. art. L. 1251-6), point qui n’admet habituellement aucune dérogation, même par accord de branche étendu.

La deuxième loi d’urgence prévoyait que ces mesures d’exception pouvaient s’appliquer aux contrats de travail conclus jusqu’au 31 décembre 2020. L’ordonnance du 16 décembre 2020 assouplit cette échéance en permettant de fixer par accord collectif une date différente, avec toutefois pour limite le 30 juin 2021.

Par exception, la possibilité de recourir à des intérimaires en dehors des cas prévus par la loi prendra fin le 31 décembre 2020, sans aménagement possible.

Prolongation et toilettage du régime dérogatoire spécifique au prêt de main-d’œuvre

Mesures de simplification prolongées au 30 juin 2021. - Afin que les entreprises en sous-activité puissent plus aisément prêter des salariés à des entreprises qui, au contraire, seraient très sollicitées, la deuxième loi d’urgence a facilité le recours au prêt de main-d’œuvre, avec des mesures d’exception applicables jusqu’au 31 décembre 2020 (loi 2020-734 du 17 juin 2020, art. 52).

L’ordonnance du 16 décembre 2020 prolonge certaines de ces mesures jusqu’au 30 juin 2021. Cela concerne :

-la possibilité, en cas de prêt de plusieurs salariés par une même entreprise, de ne signer qu’une seule convention, alors que, en temps normal, il faut une convention par salarié (c. trav. art. L. 8241-2) ;

-la possibilité de ne pas préciser dans l’avenant au contrat de travail les horaires d’exécution travail et d’indiquer seulement un volume hebdomadaire, les horaires étant fixés en second lieu par l’entreprise utilisatrice, avec l’accord du salarié.

Rétablissement de la consultation préalable du CSE dès le 1er janvier 2021. - La deuxième loi d’urgence a permis également à chaque entreprise de n’organiser qu’une seule réunion du CSE pour toutes les conventions, de surcroît a posteriori.

Cette mesure n’est pas prolongée, elle cessera donc de s’appliquer le 1er janvier 2021. À cette date, il faudra donc consulter le CSE sur les différentes conventions signées, préalablement à la mise en œuvre du prêt.

Assouplissement de la notion de but non lucratif : recentrage sur l’activité partielle. - Enfin, la deuxième loi d’urgence loi a facilité le prêt de main-d’œuvre en autorisant certaines opérations qui, dans le cadre du régime de droit commun, seraient considérées comme à but lucratif (et donc interdites).

Ce régime dérogatoire admet en effet que le montant facturé par l’entreprise prêteuse à l’entreprise utilisatrice soit inférieur aux salaires versés au salarié, aux charges sociales afférentes et aux frais professionnels remboursés à l’intéressé au titre de sa mise à disposition temporaire. Le montant facturé peut même être égal à zéro. Dans ces hypothèses, l’opération de prêt de main-d’œuvre n’est pas censée avoir de but lucratif pour l’entreprise utilisatrice.

L’ordonnance du 16 décembre 2020 revoit le champ d’application de ce dispositif exceptionnel.

Aujourd’hui, c’est la situation de l’entreprise utilisatrice qui permet de déterminer si l’on peut bénéficier de l’assouplissement de la notion de but non lucratif. Cette entreprise doit appartenir à l’un des secteurs d’activité particulièrement nécessaires à la sécurité de la Nation et à la continuité de la vie économique et sociale déterminés par décret : secteur sanitaire, social et médico-social, certaines activités de la construction aéronautique, une partie de l’industrie agroalimentaire, etc. (décret 2020-1317 du 30 octobre 2020). Il faut en outre que l’intérêt de l’entreprise utilisatrice le justifie eu égard aux difficultés économiques liées à la propagation du covid-19.

À partir du 1er janvier 2021, on se placera du point de vue de l’entreprise prêteuse. Pour que l’opération n’ait pas de but lucratif, il faudra tout simplement que cette entreprise ait recours à l’activité partielle (ex-chômage partiel). À la lettre du texte, il s’agit de l’activité partielle « classique », pas de l’activité partielle de longue durée.

Ainsi, quelle que soit la situation de l’entreprise utilisatrice, elle pourra bénéficier d’un prêt de main-d’œuvre à facturation nulle ou inférieure, sans qu’il s’agisse d’une opération à but lucratif, lorsque l’entreprise prêteuse utilise l’activité partielle.

Inversement, cela permet à l’entreprise prêteuse qui recourt au chômage partiel de maintenir l’activité et les compétences de salariés qui, sans ce dispositif, pourraient être placés en chômage partiel.

Ord. 2020-1597 du 16 décembre 2020, JO du 17