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Rupture du contrat

Pas de rupture conventionnelle dans un contexte de harcèlement moral s’il y a vice du consentement

Est-il possible d’envisager une rupture conventionnelle avec un salarié qui s’estime victime de harcèlement moral au sein de l’entreprise ? Oui sur le principe, mais attention au vice du consentement, comme le montre une jurisprudence récente.

Une rupture d’un commun accord

Un employeur et un salarié en CDI peuvent convenir de rompre leur contrat de travail en signant une rupture conventionnelle. Pour être valable, il faut notamment que l’accord de l’employeur et du salarié à cette rupture soit libre et exempt de tout vice du consentement (c. trav. art. L. 1237-11 ; c. civ. art. 1130 et 1131).

Par exemple, cela signifie que l’employeur ne doit ni faire pression sur le salarié, ni le menacer pour qu’il accepte la rupture conventionnelle (cass. soc. 23 mai 2013, n° 12-13865, BC V n° 128).

Lorsque le consentement a été vicié, en cas de contentieux la rupture conventionnelle n’est pas valable et l’employeur encourt une condamnation pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, voire licenciement nul dans certains cas (ex. : salarié protégé).

Un accord valable de la part d’un salarié harcelé ?

Peut-on considérer que le salarié a valablement donné son accord s’il l’a fait alors qu’il s’estimait, par ailleurs, victime de harcèlement moral dans le cadre du travail ? En effet, le risque, c’est que dans un tel contexte de violence morale, son consentement soit vicié (c. civ. art. 1140 à 1143).

La Cour de cassation a déjà eu l’occasion de trancher cette question. Elle estime que le contexte de harcèlement moral ne fait pas a priori obstacle à ce que le salarié ait consenti librement à la rupture conventionnelle.

En d'autres termes, pour la Cour, un contexte de harcèlement moral ne justifie pas en soi l’annulation d’une rupture conventionnelle. Pour ce faire, il faudrait que le salarié invoque et établisse le lien entre le contexte de harcèlement et son consentement vicié au moment de la conclusion de la rupture conventionnelle (cass. soc. 23 janvier 2019, n° 17-21550 FSPB).

Accord vicié par le harcèlement moral

La Cour de cassation s’en tient à cette analyse dans sa décision du 29 janvier 2020. Mais cette fois, elle reconnaît, que le vice du consentement causé par le harcèlement moral était bien établi.

En effet, les juges d’appel avaient constaté qu’à la date de la signature de la convention de rupture conventionnelle, la salariée était dans une situation de violence morale en raison du harcèlement moral et des troubles psychologiques qui en résultaient.

Ce faisant, la Cour se situe dans la droite ligne d’un arrêt remontant à quelques années (cass. soc. 30 janvier 2013, n° 11-22332, BC V n° 24).

Cass. soc. 29 janvier 2020, n° 18-24296 D